La Galleria d’Arte Maggiore g.a.m. accueille un véritable hommage à Bologne, ville à laquelle elle est profondément liée : c’est ici que la galerie a été fondée en 1978, et c’est ici qu’est né et a vécu l’une de ses figures les plus significatives, Giorgio Morandi. Cet hommage prend forme à travers le regard sensible de Lorenzo Capellini, photographe de renommée internationale, dont l’intégralité de l’archive photographique a été acquise par La Biennale de Venise.
L’exposition présente un parcours visuel qui traverse certaines étapes symboliques de la ville, parfois profondément liées à l’histoire même de la galerie. Le point de départ incontournable est en effet constitué par les prises de vue réalisées par Capellini à l’intérieur de la maison de Giorgio Morandi, un espace suspendu dans le temps, où la lumière, les objets et le silence semblent encore préserver la présence discrète du maître. Capellini restitue la poésie de ce lieu en s’attardant sur les objets utilisés pour les célèbres natures mortes de Morandi et sur la simplicité du mobilier, nous offrant des fragments silencieux dans lesquels imaginer l’artiste évoluer entre gestes répétés, attention au détail et dévouement infini.
À côté des images recueillies dans la maison de l’artiste, l’exposition s’ouvre à d’autres lieux emblématiques de la ville, chacun porteur d’une histoire et d’une atmosphère uniques. Le parcours se poursuit dans le domaine artistique avec les photographies dédiées au Compianto sur le Christ mort de Nicolò dell’Arca, conservé dans l’église Santa Maria della Vita à Bologne. Les photographies de Capellini révèlent la force émotive extraordinaire de ce chef-d’œuvre de la Renaissance italienne, en saisissent l’intensité dramatique, restituée au spectateur dans toute la puissance de son pathos. Le trajet continue ensuite dans les espaces historiques de Majani qui, avec leur mobilier d’époque et leur parfum de chocolat, évoquent une Bologne faite de tradition et de savoir-faire artisanal. Les hospices, lieux de soin et de profonde humanité financés par la Fondazione Hospice MT. Chiantore Seràgnoli Onlus, sont restitués par Capellini avec un respect empreint de participation. La librairie historique Nanni, depuis toujours carrefour d’idées, de voix et de rencontres, revit dans les prises de vue avec toute l’effervescence culturelle qu’elle a toujours su susciter. Ensemble, ces lieux composent une mosaïque de mémoires et de présences, un itinéraire sentimental qui traverse la Bologne d’hier et d’aujourd’hui. Les photographies de Capellini ont été récemment publiées dans le livre Bologna. Frammenti di Emozioni de Lorenzo Sassoli de Bianchi, édité par Minerva en 2025.
À travers le regard de Lorenzo Capellini, la Galleria d’Arte Maggiore g.a.m. renforce son lien avec le territoire, démontrant comment une vocation internationale peut — et doit — coexister avec une identité profondément enracinée, dans la conscience que s’adresser à un public global signifie également préserver et valoriser ses propres racines.
Notes biographiques:
Lorenzo Capellini est un photographe italien d’une importance exceptionnelle, dont la carrière s’étend sur plus de six décennies, traversant genres, continents et protagonistes de l’art, de la culture et de la société. Né à Gênes, il commence son activité à Londres entre 1958 et 1964, collaborant avec d’importantes publications anglaises et italiennes, parmi lesquelles le célèbre hebdomadaire Il Mondo de Mario Pannunzio, et réalisant également des documentaires pour la RAI.
En 1959, envoyé en Espagne pour des reportages sur la corrida, il rencontre Ernest Hemingway, avec lequel il noua une relation de profonde connaissance. Dans les années soixante, Capellini voyage plusieurs fois en Afrique avec Alberto Moravia pour des reportages publiés dans le Corriere della Sera. De retour en Italie, il concentre son attention sur les artistes : il photographie des sculpteurs du calibre de Moore, Marini et Pomodoro, et dans le domaine de l’architecture, il collabore avec d’importantes revues. Son lien avec la Biennale de Venise constitue l’un des axes centraux de sa biographie. De 1974 à 1978, Capellini est le photographe officiel de la Biennale, documentant des éditions clés sous la présidence de Carlo Ripa di Meana. Ce travail a donné naissance à un patrimoine visuel d’une valeur historique et artistique immense, au point que l’Archivio Storico delle Arti Contemporanee de la Biennale a acquis l’intégralité de son fonds photographique. En 2023, à l’occasion de l’acquisition de son archive par la Biennale, une exposition intitulée B74-78. Lorenzo Capellini. Un récit photographique a été organisée à Venise, retraçant sa contribution visuelle au quadriennat de la présidence Ripa di Meana (1974–1978). Il a exposé ses photographies dans plus de 250 expositions personnelles à travers le monde, notamment au Centre Pompidou-Beaubourg à Paris, à la New York University, au Palazzo Reale de Milan, au Palazzo Vecchio de Florence, pour n’en citer que quelques-unes. Il a alterné campagnes à vocation environnementale et de défense des animaux — du Canada au Pacifique jusqu’à l’Afrique du Sud — et travaux dans le monde lyrique : du Teatro alla Scala de Milan au Teatro Comunale de Bologne. Il a publié plus de quatre-vingts livres, parmi lesquels figure une série réalisée avec des amis écrivains sur les lieux qui leur sont chers, comprenant entre autres le volume Bologna. Frammenti di emozioni réalisé avec Lorenzo Sassoli de Bianchi : l’Afrique avec Moravia, la Sicile avec Dacia Maraini, Cervo avec Pietro Citati, pour n’en citer que quelques-uns.
Grâce à ce parcours, Capellini a su devenir un témoin visuel du XXème siècle artistique et littéraire, en Italie comme à l’international, avec un langage à la fois poétique et documentaire. Il a contribué à consolider la mémoire historique de la Biennale de Venise ainsi que d’autres institutions culturelles majeures.
