Histoire d'art et de beauté

AD - Architectural Digest, Janvier 1, 2002

Pour Franco Calarota, de la Galleria d’Arte Maggiore, il faut d’abord aimer, puis acheter.

 

À quelles expressions de l’art contemporain votre galerie s’intéresse-t-elle le plus ?
La galerie a toujours suivi une ligne très précise. Il ne s’agit pas de privilégier telle ou telle tendance, mais la haute qualité des œuvres et des artistes. Jean Cocteau ironisait déjà, il y a des décennies, sur ceux qui courent après les « signatures », au risque de se contenter d’œuvres médiocres, voire franchement laides. Pour nous, il est au contraire fondamental que chaque œuvre soit une pièce importante d’un artiste important : l’art est exclusif par sa qualité, non par son prix élevé.

Quels sont l’artiste ou les artistes qui représentent le mieux votre galerie ?
Les grands maîtres de l’art moderne constituent une référence constante pour la galerie : de l’Impressionnisme à Klee, du Surréalisme de Miró, Magritte, Matta, à l’avant-garde américaine de Franz Kline et Louise Nevelson, de De Chirico à Campigli, de Savinio à Severini. Avec une prédilection pour Morandi, l’artiste qui nous accompagne par son génie silencieux.

Comment se porte aujourd’hui le marché de l’art ? Quelles sont ses perspectives d’avenir ?
Enfin, le marché de l’art est en train de se transformer. Le paroxysme du profit à tout prix touche à sa fin : vendre et acheter redeviennent une affaire d’amour et de réflexion. Dans cette perspective, l’histoire, le sérieux et la fiabilité d’une galerie deviennent des valeurs inestimables. Nous n’avons jamais cru à la spéculation à court terme. La galerie est un lieu de culture qui contribue, avec les musées et les chercheurs, à identifier les valeurs authentiques et à les faire reconnaître par les collectionneurs, tout en s’en portant garante. Acheter et vendre ne sont qu’une face de la médaille : il y a aussi la catalogation, l’étude des œuvres, les publications culturelles, la collaboration avec les institutions publiques dans l’organisation d’expositions.

Sur quels jeunes artistes conseilleriez-vous de miser aujourd’hui ?
Davide Benati et Nino Longobardi sont les artistes que nous présentons. Ils exposent dans le même espace que les grands maîtres du siècle.

Quel conseil donneriez-vous à ceux qui souhaitent aujourd’hui devenir collectionneurs ?
Comme l’enseignait le galeriste Kahnweiler au début du siècle, il faut d’abord aimer, puis acheter. Si l’on comprend que ce sont des valeurs historiques qui vous accompagnent pendant des décennies, qui reflètent, chaque fois que vous les regardez, l’image que vous avez de vous-même, alors naît le véritable plaisir du collectionnisme. Le gain, donc, ne vient pas d’avoir payé une œuvre moins cher, mais de jouir du plaisir exclusif de la qualité et de la beauté : d’ailleurs, ceux qui ont agi ainsi ont toujours fait aussi de bonnes affaires.

 

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